Didier Van Cauwelaert, Cheyenne
1993, Le Livre De Poche, 128 pages
Dans ce court roman, il y a deux parties distinctes : un récit d’enfant émerveillé par son premier amour, puis le retour au présent entrecoupé de brèves retrouvailles passées et décevantes, en tant qu’adulte.
Le récit rétrospectif est donc en deux teintes : joie et humour dans le premier, mélancolie et introspection dans le second. L’ensemble avec le charme et la sensibilité du petit, jeune et moins jeune Didier Van Cauwelaert, séducteur, amoureux, imaginatif.
Si on peut lui reprocher une image démodée (!) de la virilité : « Je suis un ingrat, je suis un salaud et ça me rassure, quand je regarde Cheyenne : c’est le commencement de la virilité » (p 32), on ne peut pas blâmer son manque d’imagination. Celle du Didier à onze ans (qui se retrouvera dans le petit Didier de Cheyenne plus tard) est déjà vivace et déterminée. Un mot, un nom et les Indiens débarquent! Le vol et le mensonge ne font pas peur à l’enfant. La débrouillardise et la passion de l’écriture le mènent à son but, quand bien même il doit rivaliser avec les atouts des adultes. Un rien autobiographique, le portrait du « je » narrateur se dessine clairement. Amoureux enfin, il l’est, mais n’est-il pas attaché à son rêve comme à une illusion perdue ?
On retrouve (par exemple dans La femme de nos vies) le thème du premier amour enfantin/adolescent : un coup de foudre vécu trop jeune pour une femme adulte non disponible. Le souvenir tenace, le hasard des rencontres fortuites ou celles programmées plus ou moins ratées (ou manquées de peu : par la vieillesse dans La femme de nos vies ou par l’accident (suicide ?) dans Cheyenne). On est proche de la chanson de Brassens « Les Passantes » (vers d’Antoine Pol) à laquelle j’ai immanquablement pensé.
Citations :
– p 45 : « Aujourd’hui où j’essaie, pour préparer nos retrouvailles, de reconstruire le petit garçon que j’étais dans cette cuisine, je crois que cet aveu de mensonge était une pudeur de la vérité. »
– p 115 : « On casse parfois son fil au départ, et on passe ensuite sa vie ensuite à refaire des nœuds. »