Pierre Martial, L’enfant qui croyait aux étoiles
2023, éd Victor H/Livres partout, 367 pages.
Quel plus beau cadeau à offrir à celles et ceux qui n’ont pas la possibilité de lire et à celles et ceux qui les soutiennent qu’un livre qui parle d’un jeune orphelin dont le cœur et le courage sont exemplaires ? Le livre de Pierre Martial est l’un de ceux-là !
Pierre Martial n’est plus à présenter : c’est un « inlassable défenseur des livres ». Autrement dit, outre le fait qu’il consacre l’intégralité des droits d’auteur et des bénéfices de ses livres à la défense de la lecture auprès des enfants et personnes défavorisées, il est engagé dans l’association « Livres Partout » qui organise des activités littéraires « hors les murs », des diffusions gratuites de livres, des évènements littéraires comme les lâchers de livres sur l’espace public et dans les squares, il pratique le crossbooking, approvisionne les boîtes à livres, réalise des lectures publiques, etc.
Convaincu que les livres et la lecture apportent la lumière à chacune et chacun, il est le premier à croire à une bonne étoile. Le titre de son dernier roman L’enfant qui croyait aux étoiles est non seulement significatif, mais son exergue : « Là où il n’y a pas d’espoir, nous devons l’inventer » (Albert Camus) est si vraie que nous ne pouvons que lui emboîter le pas.
Profondément ancré dans une réalité qu’il côtoie en tant que journaliste (il défend des causes honorables telles que, par exemple, la lutte contre la dictature en Birmanie), Pierre Martial connaît celle des enfants fugueurs (40 000/an/France) mal-aimés ou maltraités. Lorsque le jeune protagoniste de son deuxième roman commence à se stabiliser dans une famille d’accueil, une décision administrative intervient de façon soudaine et sans raison. L’adolescent la refuse et part rejoindre la communauté des poulbots de Montmartre qu’il croit encore d’actualité. Il s’appelle Charlie. Est-ce une allusion au journal à l’esprit libre de Charlie Hebdo ? Ou bien à la série de bande dessinée (par Magda et scénarisée par D. Lapière) : “Où est Charlie” ? Quoi qu’il en soit, on cherche Charlie.
Comme pour son premier roman : Le cinquantième livre, Pierre Martial nous offre une fresque multiculturelle de la légendaire butte Montmartre que son enthousiasme pare de solidarité, de tendresse, du sens de l’humain sans en cacher pour autant les dérives. On retrouve la généreuse et hétéroclite « tribu » du n°1 place du Tertre, Ernest le libraire et son chien Hé, rue Couté.
Les apartés (en italiques) émaillent le récit du jeune vagabond, chat errant dans la ville, de brèves informations historiques. Le texte s’accompagne de références explicites ou subtiles à des auteurs comme Robert Sabatier (p 42), l’écrivain brésilien José Mauro de Vasconcelos (Mon bel oranger) et l’italien Italo Calvino (Le baron perché, p 19-20), Alain-Fournier (Le grand Meaulnes, p 169), Roland Dorgelès (Les Croix de bois)… et des allusions à des titres bien connus : Au revoir là-haut, Stupeurs et tremblements, La vie devant soi, « La chasse à l’enfant », poème de Prévert, et j’en passe.
Et c’est encore un livre qui va faire « toute la différence » (p 353) : Le Petit Prince d’Antoine de Saint-Exupéry (p 44). Image allégorique de l’amitié contre la barbarie et de l’absurdité de la vie, rébellion qui s’impose contre les dictats incohérents et injustes, et le saut d’un enfant qui cherche à décrocher…les étoiles! Elles fascinent l’adolescent : elles incarnent la projection idéalisée de la présence de ses proches disparus alors que la tombe du cimetière les maintient dans la réalité d’une absence résignée.
L’auteur sait comment toucher la corde sensible des lectrices et des lecteurs.
Si ce second opus montmartrois peut se lire indépendamment du premier, il reste dans le droit fil de l’auteur. Il consacre l’esprit incroyablement altruiste et l’immense dévotion aux livres de Pierre Martial.
Citation(s):
– p 186 : “Il [Charlie] aimait tant les arbres. Il s’y sentait, depuis toujours, si bien en leur sein. […] Il s’approcha du tronc noueux et se colla doucement contre l’arbre. L’enserra tendrement.”