
John Berendt, Minuit dans le jardin du bien et…
1994, France loisirs, 388 pages, titre original : Midnight in the Garden of Good and Evil.
Savannah, Georgie, Chronique d’une ville : tel est le sous-titre du livre.
Si ce n’est pas un roman attesté, cette chronique en prend une forme narrative approchante.
L’auteur se met en scène dès son arrivée dans la ville de Savannah. Il raconte ses débuts, ses découvertes et ses rencontres puis enchaîne sur un procès fleuve pour drame passionnel qui dura huit ans, fut jugé quatre fois et maintint le suspens dans une ville si friande de ses propres faits-divers.
En effet, Savannah « est tournée sur elle-même », elle « s’est développée vers l’intérieur », à tel point que son intérêt reste focalisé sur la bizarrerie de ses habitants. Et il y en a kyrielle, saugrenue, plus ou moins sympathique et plus ou moins dangereuse.
À l’image de « la ville-jardin romantique », John Berendt oppose celle « des secrets recelés par ses retraites ombragées » (p 386). Minuit dans le jardin du bien et du mal laisse planer un envoûtement au-dessus des savannahiens, que l’on y croit ou pas.
PS: Je n’ai pas vu le film de Clint Eastwood mais je me propose de le faire prochainement.
26/07/2021 :
Je viens de voir le film de Clint Eastwood avec John Cusack et Kevin Spacey.
Il est toujours assez difficile de “résumer” un livre dans un livre. Ce n’est d’ailleurs pas l’essentiel. Le réalisateur met en scène sa lecture avec ses moyens à disposition. (voir d’autres films issus de livres ici)
Eastwood a donc centré le film – pourtant assez long – sur le meurtre, alors que Berendt avait amené cette affaire criminelle dans le contexte bien particulier d’une ville asphyxiée par ses traditions, son esprit hermétique et à la fois extravagant dans la mesure où la surface reste lisse. Quand la vague déferle, les apparences reprennent le dessus d’un quotidien qui tolère sans souscrire.
Dans le film, le déroulement du procès est tronqué et il manque, à mon avis, un élément essentiel à la conclusion : c’est que J. Williams est acquitté uniquement lorsque le procès est déplacé dans une autre ville !
Il y a d’autre “détails” qui ont été soit plus développés (Mandy), soit survolés (Joe Odom), ou même oubliés (les Adler, le juge Lawton…). De plus, j’ai regretté les “mon grand” ou “fils” adressés à John Kelso (le journaliste écrivain), familiarité condescendante que je n’ai pas trouvée dans le livre de Berendt.
Citations :
– p 35 : « Il y a exactement vingt et un squares » ; « Les squares étaient les joyaux de Savannah » ; James Oglethorpe, le fondateur de la Géorgie […] avait décidé que Savannah serait bâtie autour de squares ».
– p 387 : “Il y entrait de la fierté. De l’indifférence aussi, et encore de l’arrogance. Mais au-delà, elle [Savannah] n’avait qu’un seul but : préserver un mode de vie qu’elle croyait attaqué de tous les côtés.”
– p 387 : « Ce qu’elle désirait le plus ardemment : rester seule. »
– p 388 : « Ses habitants ont poussé comme des plantes de serre soignées par un jardinier complaisant. L’ordinaire est devenu extraordinaire. Les excentriques ont prospéré. »