
Edna O’Brien, Décembre fous
2004, 10/18, 310 p, titre original: Wild Decembers,
L’édition mk2 « à mi-mots » propose un coffret comprenant un portrait de l’autrice composé d’un documentaire et de rushes (vidéo et entretiens) à l’aide d’un DVD (à transposer, si un lecteur de ce type manque).L’autrice s’exprime en anglais, clairement, mais il n’y a pas de sous-titrage (ni de traduction par conséquent).
Le documentaire est tourné principalement en extérieur, lors d’une marche dans la forêt. Les images (volontairement) instables montrent un décor à la tonalité sombre, de l’eau de la rivière à celle des nuages. À l’intérieur, la maison aux rideaux tirés est éclairée avec des bougies (hormis dans la véranda d’où l’on aperçoit une nature isolée et un cheval qui circule librement). L’écrivaine se détache donc sur un fond grave, intimiste qui révèle une proximité avec son écriture.
Edna O’Brien parle de ses livres. Sans résumer ses propos, je mentionnerai quelques grandes lignes : son écriture est comme le flot d’une rivière qui coule ; elle s’inspire émotionnellement des paysages de l’Irlande où elle aime faire des recherches au cours desquelles elle fait des rencontres, converse avec les gens… Elle parle des écrivains (Yeats, James Joyce, Shakespeare…) qui (lui) fournissent comme une éducation étant donné que, selon l’écrivaine, lire les grandes œuvres nourrit (food). Elle a été très tôt rebelle et féministe, car elle a vu autour d’elle que les femmes avaient peur des hommes (males) et de leur mari (husbands), violents. Elle mentionne les effets de l’alcool… de l’IRA… Son enfance a baigné dans l’idée que tout est vice, pêché; la relation avec sa mère (très religieuse) a été particulière; elle a épousé un homme qui ressemblait à son père : tyrannique, jaloux, cruel (elle utilise l’image de Dracula). Son destin d’écrivaine lui semblait inéluctable, comme une respiration (breathe). Pour elle, écrire est sacré (writing is holy), c’est un désir d’appartenance plus par l’esprit que par le corps (belong by spirit if not by body) et faire lire est essentiel (on aime ou on n’aime pas tel ou tel, but il n’y a pas de raison d’insulter les écrivains (hit people with his own shit). Elle décrit son style (color of my writing) comme “black with shots of blue rays”; elle affirme que le style plat ne fonctionne pas (flat language doesn’t work) et que la poésie est un mystère (poetry is a mystery)…
J’ai décidé de faire découvrir cette écrivaine contemporaine Irlandaise, suite à ma visite au Centre culturel Irlandais. Je rappelle que la Saint Patrick (patron des Irlandais) est régulièrement fêté par les Irlandais et leurs sympathisants. Le Centre culturel Irlandais est situé 5 rue des Irlandais dans le 5ᵉ arrondissement de Paris, dans le bâtiment du collège des Irlandais. Il propose des expositions, dispose d’une librairie et d’une chapelle.
Le 17 mars, des animations sont organisées en toute convivialité pour partager quelques bières, danses et musique. Après ma visite au centre (en 2024), je me suis rendu au Père Lachaise voir la tombe de l’écrivain Oscar Wilde, décédé à Paris le 30 novembre 1900. Je ne reviendrai pas sur la bibliographie d’Oscar Wilde (de son nom complet Oscar Fingal O’Flahertie Wills Wilde) et dont Le Portrait de Dorian Gray (publié en 1890 puis révisé en 1891) est l’unique roman (fable philosophique et pacte faustien, idées sur l’Art et l’Esthétisme), mais je rappellerai cette occasion de connaître ou de redécouvrir les auteurs irlandais (et ceux qui ont aimé la France) et dont nous avons parlé (Becket et sa maison à Ussy sur Marne, Wilde et les stèles commémoratives (tardives) à Dublin (voir articles ici et ici, rubrique “balades et maisons”).

Décembre fous d’Edna O’Brien se déroule à Cloontha, en Irlande.
Entre les Bugler et les Brennan, des différends autour de faits empreints d’incompréhension, de jalousie et de vanité se sont accumulés progressivement. Dans cette campagne, les traditions d’appartenance, de propriété et d’honneur régissent la vie simple des gens rustiques, mais pas toujours aussi simples. L’obsession se transforme en déraison et en haine. Incontrôlable, elle ne peut qu’exploser, d’une manière ou d’une autre. La folie est déjà présente dans le titre.
Le paysage irlandais est omniprésent, aussi sombre que rude. Il est l’un des thèmes prédilection de l’écrivaine.
Edna O’Brien est une figure essentielle pour qui s’intéresse à l’Irlande et à sa littérature contemporaine. Son ton abrupte, son rythme décalé (changements de temps, de personnes, de lieux, etc.) forment un texte en mosaïque dont les facettes miroitantes démultiplient une image volontairement brisée.
Citations :
– p 284 ; “Comme la Cagne le dirait plus tard, il y avait de l’irrationnel en cet homme, de la folie dans son regard.”
– p 309 : “Une minute de folie dont dépend toute une vie.”