
Lina Nordquist, Celui qui a vu la forêt grandir
2022 Buchet Chastel, 2024 10/18, numérique 346 p.
Les chapitres alternent entre passé (1897) et présent (1973), entre deux femmes que tout semble opposer, mais qui sont liées par de terribles secrets: Unni et Kara.
Celui qui a vu grandir la forêt, c’est Roar, le fils d’Unni, le mari de Bricken et le père de Dag, mari de Kara.
Les deux femmes sont donc situées aux deux extrémités de la chaîne familiale dont les maillons intermédiaires sont plus que jamais imbriqués.
Elles se placent également aux deux pôles de la condition féminine : courage et résilience d’un côté, dépression et amertume de l’autre.
Entre l’horreur de la misère et la beauté de la forêt, entre la cruauté des gens et l’amour maternel, marital et filial, au cœur d’une terre nourricière mais imprévisible, combien de duos antithétiques peuvent-ils encore décrire ce roman, dichotomique jusqu’au bout et fort de toutes ces oppositions ?
Un roman poignant donc, avec une surenchère d’injustices et de drames. On s’évade du huis clos étouffant entre les deux veuves grâce à la fusion des personnages dans la forêt et la splendeur des paysages scandinaves.
Citations:
– p 23 : « Quand on aura vu toute une forêt grandir, c’est qu’on aura vécu. »
– p 28 : « – Qu’il est facile de s’habituer à tant de beauté, me suis-je extasiée. / – Il faut bien, a répondu Armod. Mais quoi qu’il arrive ne t’habitue jamais à l’horreur. »
– p 49 : « Rien que nous et nos bouleaux, ces grands gardiens blancs dispersés autour de nous, auprès de nous, chez nous. »
– p 74 : « Je retenais mon souffle et rêvais de me réfugier dans une grotte, au plus profonde de la forêt. Un endroit désert, où il n’y aurait que moi, devenue les yeux de la forêt. »
– P 131 : « La forêt, ce n’était pas que les arbres, mais ce qu’il y avait autour, dans la lumière, entre les pierres, et dessous. »