
Sébastien Japrisot, La passion des femmes
France Loisirs 1986, 467 p.
Le titre peut se comprendre de deux façons : soit la passion qu’inspirent les femmes, soit celle dont les femmes sont inspirées. En effet, dans ce roman, les femmes sont les actrices de cette passion qui les portent vers un homme, le même et à la fois différent pour chacune d’elle, au point d’inventer, la plupart du temps, une histoire romantique, passionnée et parfois tout à fait rocambolesque. Mais c’est aussi celle de cet homme pour les femmes qui les lui fait aimer pour ce qu’elles sont, chacune différentes des autres, et pour ce qu’elles lui apportent (aussi) au gré de sa vie trépidante d’aventurier.
Est-ce un nouveau Don Juan ? Semblable au séducteur mythique ? Ou un Bel-Ami à la Maupassant ? Le tour de passe-passe intervient à la toute fin avec un retournement de situation – que je ne dévoilerai pas – qui atteste, s’il en est encore besoin, de l’un des fantasmes masculins projeté sur des fantasmes féminins sur lesquels fantasment les hommes.
Quoi qu’il en soit, le roman choral (écrit dans des styles respectant (avec talent) le caractère et l’origine sociale de chacune des femmes) enchaîne les épisodes de ce roman feuilleton avec aisance et vigueur (parfois quelques longueurs), si bien que le lecteur et surtout la lectrice (peut-être ?) aimerait savoir le vrai fond de l’histoire. Les témoignages se relaient, confirmant certains points alors qu’ils en contredisent d’autres, ajoutant beaucoup de vivacité et de détails osés !
Peu importe finalement de savoir qui dit la vérité, car le récit ne lasse pas, même quand la résolution semble inévitable. Le rebondissement de dernière minute nous laisse empêtré.e.s dans notre propre imagination, appâté.e.s, leurré.e.s, piégé.e.s.
Chapeau Japrisot, on s’est bien amusé.e.s !
Citations :
– p 421 : « Elles se sont ingéniées, les unes comme les autres, à brouiller les cartes pour sauver la mise à un homme qui avait, à des degrés divers, bouleversé leur vie, mais qu’elles ne pouvaient […] se défendre d’avoir aimé. »