
Robert Galbraith, Le ver à soie
2015, GRASSET, 576 pages, lu en édition audio. (Robert Galbraith est le pseudonyme de J. K. Rowling).
Livre reçu dans le cadre de l’opération « Recevez un livre-publiez un article » de Lecteurs.com que je remercie ainsi que les éditions mentionnées.
Tout d’abord, un détail m’interpelle : pourquoi un pseudonyme s’il ne garantit pas l’anonymat ? Si J. K. Rowling a voulu séparer ses registres d’écriture (je le comprends très bien), pourquoi rendre visible son véritable nom – le nom sous lequel elle a eu le succès que l’on connaît avec la série Harry Potter, de 1997 à 2005 –, pour la publication de ses livres policiers ? S’il n’apparaît pas sur la couverture du livre papier, il est écrit en toutes lettres sur la pochette du livre audio, et dans tous les résumés et commentaires. Doit-on dire Robert Galbraith ou J. K. Rowling ? L’écrivain ou l’écrivaine ? Il ou elle ?
Ce livre audio est une seconde expérience pour moi (voir Stefan Zweig, Vingt-quatre heures de la vie d’une femme ici). Le texte est lu par Philippe Régimont dont l’accent anglais est très correct. Mais ici, il y a des dialogues et si l’acteur sait moduler la voix de ses personnages masculins, les voix féminines, trop fluettes (à part la toux chronique d’Élisabeth Tassel) sont moins convaincantes. La voix, comme l’image, « représente » la personne. Elle peut faire obstacle à la construction imaginaire du personnage. En revanche, la diction est claire, le rythme adopté par l’acteur est posé. Le découpage des « plages » lues offre des segments d’une durée raisonnable afin de s’adapter aux différents lecteurs.
Enfin, une musique d’ambiance précède chaque chapitre, introduit par un exergue tantôt énigmatique tantôt significatif.
Ceci étant dit, le roman prend place à Londres. Il fait suite à “L’appel du coucou” (2014), et s’intercale avant “La Carrière du Mal” (2017), et « Blanc Mortel » (2020). Il peut être lu séparément puisque l’histoire est différente (quelques allusions à la précédente enquête ne portent pas préjudice à la compréhension de celle-ci).
Le duo, composé de Cormoran Strike, ancien combattant en Afghanistan, et de Robin Ellacott, son assistante-apprentie détective, est complice et efficace bien qu’improbable au début : lui est taciturne, désabusé et un peu fruste, elle est pleine d’énergie, de ressources … et de patience.
L’intrigue se joue au cœur du milieu éditorial où les intérêts, les jalousies, les sentiments s’entrechoquent. Si ce genre d’imbroglio se retrouve dans de nombreux milieux professionnels, les coulisses de l’édition sont bien connues de l’auteur.e. Dans le présent roman, le procédé de mise en abyme du manuscrit dans le livre met en évidence une machination compliquée et d’une violence extrême.
La mise en place est un peu longue, le cheminement un peu lent, mais le développement des personnages, et notamment le duo Cormoran/Robin, accroche progressivement l’intérêt et la curiosité.
Pour ma part, je vais m’intéresser au premier volet de la série ainsi qu’aux suivants.
Citations:
– ” De quoi donc te nourris-tu ?
De mes insomnies ”
( Thomas DEKKER, Le Noble Soldat espagnol)
– p. 308 : ” Depuis qu’elle travaillait pour Strike, elle prenait conscience de la diversité et de l’intensité des phobies et des rancœurs qui couvaient dans le cœur des gens. C’était nouveau pour elle.”