
Richard Powers, L’Arbre-Monde
2018, Cherche Midi, lu en numérique, 598 p, titre original : The Overstory.
Notons tout d’abord que le titre français « l’Arbre Monde » ou Yggdrasil (cité p 314) est emprunté à la mythologie nordique où il désigne le cheval du dieu Odin sur qui reposent les neuf royaumes. Il est cité dans le texte.Le titre original « The Overtory » associe la hauteur de l’arbre, comptée en étages supérieurs, à l’«histoire» narrée. Hélas, le suffixe « over » peut également signaler que cette « story » est « finie »…
Le style comme le fond de ce livre est celui d’un long et ardent plaidoyer parfois un peu brusque, parfois un peu nébuleux. Présenté sous forme de roman, Richard Powers met en pratique sa philosophie : « Les meilleurs arguments du monde ne feront jamais changer d’avis. Pour ça, ce qu’il faut, c’est une bonne histoire » (p 579). Son témoignage aborde des théories scientifiques approuvées ou novatrices, d’autres controversées.
Quoi qu’il en soit, le propos démontre l’aveuglement des hommes modernes : « les cinq sens ne pèsent pas lourd face au pouvoir du dogme » (p 172), de plus en plus illusionnés : « Douggie a la conviction croissante que le plus grand défaut de l’espèce humaine, c’est sa tendance dévorante à prendre le consensus pour la vérité » (p 104). De ce fait, le renoncement suit « l’effet spectateur » (p 385) alors que les griefs sont pourtant clairement identifiés : « C’est ça qui est marrant dans le capitalisme : l’argent qu’on va perdre en ralentissant est toujours plus important que l’argent déjà gagné » (p 297).
L’« arbre est un passage entre terre et ciel » (p 72). Le roman se présente donc sous la structure d’un arbre : les chapitres : « racines » (présentation des protagonistes dont les noms sont accompagnés d’une image) ; « tronc » (les individus convergent vers la cause, chaque histoire est séparée par l’image de la coupe d’un tronc) ; « cime » (le final) ; et « graines » (ce qui reste).
À l’instar des graines, « Des mots à elle, qu’elle a quasiment oubliés, ont dérivé au fil de l’air, en ont enflammé d’autres, telles une bouffée de phéromones » (p 170), il faut espérer qu’après avoir lu ce livre-choc, quelques graines germeront dans l’esprit des gens.
Dans la même veine, je mentionnerai le film-documentaire de Yann Arthus Bertrand, intitulé « Legacy », qui fait suite à « Home » et dont les images et le commentaire démontrent l’état de notre planète.
Ce titre appartient à ma liste « Titres d’ordre végétal » ici