
Jules Michelet à Vascœuil
Jules Michelet ( est considéré comme l’un des plus grands historiens du XIXe siècle malgré des controverses, auteur de Histoire de France et Histoire de la Révolution. Il fut le premier représentant de l’historicisme en France.
Il fut aussi le grand favori de Marguerite Duras (1914-1996) : “Les grandes lectures de ma vie, celles de moi seule, (…) c’est Michelet. Michelet et encore Michelet, jusqu’aux larmes.” (p 35, Ecrire, Folio 1993).
Je veux bien croire que Marguerite Duras admirait l’homme – largement influencé par Voltaire et Montesquieu ainsi que d’autres philosophes postérieurement -, l’historien, le libéral et le républicain, mais de quelles larmes s’agit-il ?
Jules Michelet ne favorisa ni le progrès industriel, ni l’optimisme – et en cela on peut comprendre les affinités que l’écrivaine entretenait avec ses idées – mais je ne connaissais pas son engouement pour l’histoire.
“Les textes politiques aussi, mais déjà moins” (id) poursuit Duras qui reste une femme de tête, sans nul doute.
Mais quand il s’agit de citer un écrivain (puisqu’elle préfère les œuvres “écrites par des hommes” (id)), “C’est Saint-Just, Stendhal, et bizarrement ce n’est pas Balzac“(id). Rappelons que Louis Antoine Léon de Saint-Just, (an II () est un homme politique de la Révolution française, Montagnard, il est guillotiné le 9 thermidor. Eloquent, intransigeant, il prône l’égalité et la vertu.
Et quant au “Texte des textes, c’est l’Ancien Testament”, toujours selon Duras. On notera que Michelet était anticlérical et que le siècle des lumières l’était aussi.
En définitive, le seul écrivain à part entière qu’elle cite est Stendhal, dont les préoccupations étaient la recherche du bonheur et l’amour.
Ces choix semblent donc un peu surprenants.
NB: Duras ne mentionne pas le prénom dans ce texte. Mais nous savons par d’autres sources qu’il ne s’agit pas de Claude Michelet , fils d’Edmond Michelet.
Quoi qu’il en soit, pénétrons au musée qui lui est dédié, situé à Vascœuil (prononcé Vacoeuil, sans le “s”) :
le musée l’entrée buste de Michelet
A l’époque de Michelet : il y avait Nadar (le photographe) et Napoléon III (l’empereur des français) bien sûr, mais aussi Baudelaire, Nerval, Sand, Flaubert, Zola, Musset, littré, Manet, Monet, Bizet, Sarah Bernhardt, etc.
Ensuite, promenons-nous dans le parc où sont exposées les œuvres de grands artistes tels que :
Folon Dali Braque Calder
Vient la demeure familiale, restaurée et ouverte au public (certaines salles sont fermées à cause de la pandémie de Covid) :
le pigeonnier le cours d’eau qui ceinture le domaine l’entrée la demeure dans son parc
Enfin, l’exposition “Hyper” de JF Rauzier, à l’intérieur (et sous-sol voûté) de la propriété : (vidéo ici)
Autre choix surprenant à Vascœuil, cette exposition sur Jean-François Rauzier, photographe plasticien, créateur de l’Hyperphotographie. (voir autre vidéo ici)
J’ai aimé la représentation d’un monde onirique et la mise en évidence d’un patrimoine grandiose mais périssable. JF. Rauzier touche à tous les domaines de la société en les transposant dans des mondes chimériques. Nous pouvons prendre conscience de nos limites, de nos insuffisances et de nos ambitions dans un cadre aussi démesuré. La perception est fulgurante.
Populaire, utopique, « ré-enchanteur du réel » (commissaire d’exposition Damien Sausset), « baroque numérique » (commissaire d’exposition Régis Cotentin), le photographe est passionné de voyages, de patrimoine, d’architecture et je rejoins par là son imaginaire débordant.
Pourtant, comme je me suis demandé pourquoi Braque, Calder ou Folon dans le parc ? Pourquoi la photographie à Vascœuil ? Pourquoi Rauzier chez Michelet ?
Est-ce pour leur vision du passé, de l’avenir ? était-ce une intention culturelle, un espace privilégié ou juste un lieu disponible ?
Quoi qu’il en soit, ma découverte a été agréable.