
Carole Fives, Tenir jusqu’à l’aube.
Gallimard 2018, 177 p.
Livre reçu dans le cadre du Jury du Prix Landernau 2018.
Enfer au quotidien d’une mère « solo », le livre de C. Fives donne un effet bien réel à une histoire vécue par certaines femmes.
A partir du récit de la chèvre de Monsieur Seguin – petite philosophie de la liberté malgré le risque (la mort de la chèvre) ou le désarroi de la femme (être abandonnée par son conjoint, déroger au modèle traditionnel), malgré la connaissance de la faute (laisser l’enfant seul quelques minutes pour redevenir une femme et plus uniquement une mère, désobéir à “M. Seguin”) – le livre renvoie au conte qui résonne comme sa métaphore.
Tout le monde semble tirer sur la corde: dans le roman, le père égoïste part, la mère se démène pour survivre et l’enfant la “tyrannise”, dans un monde où la difficulté à vivre ensemble reste problématique.
C’est à la fois un témoignage, une revendication et un constat social. Le roman expose un problème sociétal en même temps qu’individuel : la femme est sans conjoint (aspect personnel) et elle est isolée face à la société (aspect sociétal) qui ne la comprend pas, qui ne l’aide pas, qui ne l’intègre pas…
Tenir jusqu’à l’aube provoque ou non l’empathie, c’est affaire de personnalité, d’affect ou de connaissance du sujet.
J’ai aimé l’écriture de C. Fives, mais je ne dirai pas que l’autrice est féministe. Je dirai que le livre est féminin dans le sens où il pose un problème vu par une femme. Pas un problème de femme seulement: il existe des pères “solos”.
C’est un roman fort qui prend le contre-pied de nombreuses images imposées. Il ne revendique, n’insulte, ne récrimine, ne se plaint, ni n’accuse à aucun moment. Si critique il y a, c’est au lecteur et à la lectrice de la relever. Si le constat est évident, c’est au lecteur et à la lectrice de le dire.