
Claire Fauvel, La nuit est mon royaume
Rue de Sèvres 2020,150 pages.
Album (BD- Jeunesse) reçu dans le cadre de La Communauté Culturelle Leclerc.
La nuit est mon royaume raconte la rencontre de deux adolescentes vivant à Créteil, leur amitié, la formation de leur duo de Rock Stars et leurs débuts dans la société. Ce faisant, elles se heurtent à des difficultés familiales dues à des divergences de mode de vie et de croyances (religieuses notamment) et à des moyens précaires.
L’ambition et l’espoir, les premiers émois et les premières désillusions, l’échec et l’esprit combatif viennent émailler un album à l’écriture sensible et lucide.
Pour autant, la partie écrite n’est pas très importante et se résume à de brefs dialogues – l’exergue dédié à V. Hugo éclaire suffisamment l’idée directrice. Les bulles sont petites et de formes variées. La partie visuelle est donc largement plus développée. Pour en revenir aux phylactères, ils sont ronds lorsque les paroles sont reproduites au style direct, dentelés lorsqu’il s’agit d’une conversation téléphonique (p 69), et « absents » lorsque les chansons se font entendre (p 56-57). Le carré et le rectangle restant les formes du cartouche (narration, ou pensée, ou texto éventuellement). L’appendice en virgule ondule de temps en temps (p 99, 102, 108) et passe à la vignette suivante (les reliant) à l’occasion (p 54).
La variété s’inscrit également dans la page : il peut s’agir de planches avec des bandes d’un nombre différent de vignettes ou de plans (plan moyen, américain, rapproché, gros plan, etc. par exemple p 81, 105, 133), soit encore d’une pleine page (p 24-25, 56-57).
Les cadres (carrés, rectangles, horizontaux, en trapèze, p 51, 66), et angles de vue sont variés (plongée p 101 et contre-plongée p 100). Ils cassent la monotonie d’un rythme autrement régulier et correspond aux émotions suscitées par l’histoire.
La couleur magnifie les images. Souvent sombre (puisque le décor est souvent nocturne), elle tire du noir au bleu, du violet au grenat et du brun à l’orangé.
C’est donc avec une technique aguerrie que Claire Fauvel nous fait vivre une tranche vie contemporaine brisant les clichés sans pour autant tomber dans une euphorie maladroite.
PS: le titre de cet album est similaire au livre de Mary Higgins Clark : La nuit est mon royaume, traduction de Nightime is my time (2004). Il n’y a sans doute qu’une coïncidence dans le titre français car il n’y a aucune ressemblance par ailleurs.