Jean-Christophe Rufin, Le Suspendu de Conakry et Rouge Brésil
Un roman historique et un policier…
Rouge Brésil, Folio, 596 p
(02/01/2020)
Rouge Brésil raconte une période de l’histoire aussi rouge que le sang et le feu. La tentative de colonisation du Brésil par les Français est un épisode méconnu sans doute parce qu’il est peu héroïque et n’a rien apporté à la France ni à son image.
Suite à l’invitation offerte aux disciples de Calvin, les nouveaux débarqués s’opposent, catholiques versus protestants, huguenots contre papistes. Le point sur lequel ils se déchirent est celui de savoir si le christ est présent pendant la cène, à savoir si le corps et l’esprit sont dans le pain et le vin. La notion de cannibalisme est alors évoquée via les indigènes qui eux mangent leurs ennemis et non pas leurs idoles !
C’est un récit de voyages et d’aventures exotiques, relevé par l’histoire d’un lien fraternel et affectueux qui évolue vers l’amour, entre deux adolescents. Just et Colombe – dont les prénoms sont déjà un manifeste – remettent en cause la notion du « sauvage » entre « bon » et « mauvais ». Si Just hésite, il finit par se rallier à Colombe qui a rejeté la civilisation telle qu’elle lui a été imposée (la condition de la femme est effleurée). Ensemble, ils s’intègrent au continent plus qu’ils n’imposent la présence de la France dans cette contrée.
Le Suspendu de Conakry
Lu en numérique( 176 p).
Comme pour Rouge Brésil, J. C. Rufin nous embarque dans un voyage à l’étranger. Cela se passe en Afrique, en Guinée plus précisément dont il décrit la chaleur écrasante et les guerres intestines entre services diplomatiques et fonctionnaires expatriés, qui rappellent un peu la lutte fratricide qui compromit l’installation des Français à Rio de Janeiro pour cause de « détail » religieux.
En revanche, le ton est ici radicalement différent. Il ne s’agit pas d’un roman historique mais d’une enquête policière menée par un consul pas vraiment fait pour la diplomatie mais pour la police d’investigation, un antihéros original au look improbable, roumain d’origine, timide et émotif, prénommé Aurel. Rien à voir à priori avec le philosophe stoïcien qui devint l’empereur romain Marc Aurèle. Et pourtant ! Il résout l’énigme rapidement en inventant un dénouement théâtralisé qui surprend et en même temps confirme le côté héroïque bien qu’incongru d’un personnage original.