Frédéric Lenoir, Le miracle Spinoza
2017, Fayard 230 p.
J’ai pris le livre avec quelques réticences en lisant le bandeau qui m’a fait penser à un “Feelgood” et devant le terme “miracle” qui ne s’accommode pas particulièrement avec la philosophie. Mais j’y ai trouvé des réflexions que j’ai jugées pertinentes.
D’une part, c’est une critique des religions révélées. D’autre part, c’est l’impact lumineux des leçons de vie tirées de la lecture de Spinoza. Par conséquent, “le miracle” aide à se sentir mieux…
Le philosophe croit en la loi divine, pas en la loi religieuse. Pour lui, le dogme n’est qu’un contrat, un ensemble de lois sociales pour une cohésion et une communauté d’affect.
Les religions sont faites pour ceux qui ne peuvent atteindre la sagesse suprême que par la soumission aux règles et à un être supérieur, suprahumain, anthropomorphique et patriarcal qui est une consolation. Elles ne sont pas pour ceux qui arrivent à cette béatitude de l’âme, ou plutôt de l’esprit, sans autre guide que la raison et l’adéquation avec les lois naturelles qui prônent l’amour, la justice, la charité et l’indulgence, instinctivement. La religion quelle qu’elle soit, dupe et avilit ceux qui s’y soumettent au profit de ceux qui l’imposent pour leur propre bien.
Spinoza réfute donc la confusion entre les pouvoirs temporels et spirituels, la politique et la foi.
À l’état de nature, il n’y a ni bien ni mal ; à l’état de société, sans la raison, les hommes se livrent à leurs passions et s’entre-déchirent. Le droit naturel devient collectif par le pacte social. Le philosophe est pro démocratie. Mais pour lui, la véritable révolution est intérieure car c’est en se transformant soi-même que l’on changera le monde.
Il prône un dieu cosmique totalement différent d’un dieu causal et intéressé, créateur de sujets avides de l’honorer pour en être récompensés. Son “Dieu” n’est pas non plus un principe finaliste et utilitaire (tout est fait pour le bien de l’homme) basé sur la crainte et l’espoir. C’est un dieu moniste (l’absolu est le fondement de toute chose), non dualiste (séparation entre Dieu et les hommes). Spinoza est proche du panthéisme ou du déisme puisqu’il pense Dieu en dehors de toute croyance et de tout culte, proche de l’athéisme, bien qu’il s’en défende pour des raisons de prudence à son époque soit parce que l’athéisme n’est pas encore percevable comme une possibilité alternative à part entière.
En ce qui le concerne cependant, le corps et l’esprit ne font qu’un (à l’opposé de la pensée de Descartes) et la dualité se situe ailleurs: elle est entre la joie et la tristesse. L’homme restant une énigme pour lui-même, toute sa vie est une question de bonnes ou de mauvaises rencontres qui lui faut écarter ou rechercher afin d’augmenter son capital joie et épanouissement. Les trois sentiments fondamentaux étant ainsi posés: joie, tristesse et désir, c’est ce dernier qui s’oppose au manque (voir Platon) et qui est le moteur de la vitalité humaine s’il est orienté vers ce qui est bon pour l’homme. La raison et la volonté ne sont pas suffisantes pour motiver le changement, seul le désir le peut.
N B “Concernant les femmes, il en reste malheureusement au stade de la misogynie congénitale des sociétés patriarcales de son époque” selon les propres termes de Frédéric Lenoir.
2 commentaires
MERCI
“merci pour ce résumé détaillé”
Phil le poète
re-bonjour Philippe,
merci encore pour votre intérêt,
vous-ai-je donné envie de lire ce livre? aujourd’hui ou un autre jour? ou bien la philosophie, Spinoza ou Lenoir ne vous ont-ils pas accroché?
à vous revoir,
Anne